Enfant, pauvre
petit qui tends tes deux poings roses,
Comme deux fleurs
d'hiver sur la neige des draps,
Etre vague qui
ris et qui pleures sans causes,
Enfant, la vie est
dure et tu la connaitras.
Dure et longue, la
vie, hélas ! la vie humaine
Et demain, dès
l'aurore, il faudra marcher seul,
Pour faire avant
le soir la grand'route qui mène
Des plis du
berceau blanc vers les plis du linceul.
Debout ! Le jour a
lui sur la côte escarpée ;
L'or du soleil
dans les lointains, crépite de bout.
Va : c'est l'heure
, voici la cuirasse et l'épée,
Et souvient-toi
d'aller sans faillir, jusqu'au bout !
Fausses vertus,
lois sans raison, devoirs fictives,
Efface de ton
coeur les mensonges dévots :
Cherche la vérité
par-dessus nos justices ;
Crois en Dieu si
tu peux, crois en toi si tu vaux.
Chéris la mer, la
grande impuissante éternelle
Qui console des
voeux déçu et des regrets :
La nature bénit
ceux vivent en elle,
Le calme naît au
coeur du calme des forêts.
Crains l'homme,
aime ton âme et méprise l'insulte ;
Sois humble avec
toi seul et sois fier devants tous
Bons ou mauvais,
défends tes amis et ton culte ;
Pardonne aux
criminels et respecte le fous.
Laisse l'être à
tous ceux que ta force te livre;
Ne rougis pas ta
main dans la chair des mourants ;
Car tous sont tes
égaux devant le droit de vivre,
Et les plus
outragés sont parfois les plus grands.
Ne daigne point
haïr ; sois fidèle à tes pactes ;
Sois franc ; ris
peu ; sois doux pour ceux qu'on fait souffrir,
Mais garde de
juger les raisons ou des actes,
Car rien n'est
absolu que l'espoir de mourir.