Depuis deux longs jours, une
neige épaisse
Implacablement descendait
sans cesse,
En flocons serrés, du ciel
morne et blanc ;
Les petits oiseaux voleraient,
piaulant,
Ayant faim, perdus dans la
plaine immense
Et transis, gelés, les
membres perclus,
S'effaraient, ne s'y
reconnaissant plus,
Il faisait très froid, nul
bruit, un silence.
Enorme de mort et l'on aurait
dit
Que tout le hameau dormait
engourdi.
Au bout du pays, presque à la
lisière
D'un grand bois sauvage, en
un chemin creux,
Dans une vilaine et triste
chaumière
Vivait un bonhomme infirme,
très vieux
Et très pauvre, avec sa
petite Yvette,
Une toute frêle et douce
fillette
D'à peine dix ans. Il ne
travaillait
Presque plus, trop faible. Et
dans sa détresse.
Le piteux logis sous la neige
épaisse
Semblait tout honteux, se
dissimulait.
Or, c'était Noël, tout au
soir, la veille
La mignonne Yvette, entendant
conter
Sur cette nuit-là d'étranges
merveilles,
S'en était allée en secret
porter
L'un de ses souliers. Oh ! de
cheminée
On n'en avait pas dehors,
sous l'auvent,
Elle s'était dit qu'en
l'apercevant
Le petit Jésus, faisant sa
tournée
Avec des joujoux très beaux
plein les bras,
Très probablement ne
l'oublierait pas.
Et quand il fit jour, un peu,
la fillette
Se leva sans bruit et vite
alla voir...
Or dans le soulier, étroite
cachette,
Un chardonneret, tout troublé,
le soir
S'y étant blotti, dormait.
Douce et bonne.
Elle prit l'oiseaux dans sa
main mignonne
Et le réchauffa, puis vint
lui jeter
Un peu de pain blanc, joyeuse
et ravie
De voir le pauvret renaître à
la vie
Et tout rassuré, se mettre à
chanter.
Lors, en le voyant plein de
confiance,
La petite en eut un bonheur
immense
Et comprit : pour sûr,
c'était le présent
que Jésus avait bien voulu
lui faire ...
Pourquoi pas ?... Dieu garde
à toute misère
A toute souffrance un baume
puissant,
Une joie aux moins, bonne et
consolante...
Celle d'alléger quelque autre
douleur
Quelque autre infortune encor
plus navrante...
C'est si doux d'aimer et
d'avoir bon coeur.